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Fragilités et oppressions. Retour sur les inégalités de l’attachement social (compte-rendu 2020-2021) > Séminaires EHESS > Pages personelles de Serge Paugam
 
Serge Paugam
 

Séminaires de direction d'études (EHESS)


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Sociologie des inégalités et des ruptures sociales

Serge Paugam, directeur d'études

Compte-rendu 2020-2021 :

Fragilités et oppressions. Retour sur les inégalités de l’attachement social


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L’objectif du séminaire était d’approfondir les inégalités de l’attachement social en explorant, au-delà de la rupture souvent cumulative des liens sociaux, repérables dans les situations d’isolement extrême ou de grande pauvreté, les cas où ces derniers, sans être rompus, apparaissent extrêmement fragiles ou caractérisés par une forme d’oppression. Il s’agissait d’étudier, à partir de diverses enquêtes, aussi bien dans les sphères domestique, associative, professionnelle que civique, ce que l’on pourrait appeler les situations-limite dans lesquelles tout peut très vite basculer, soit dans le retrait prononcé de la vie sociale, soit, au contraire, dans la protestation et la lutte. Comme les années précédentes, le séminaire proposait d’ancrer la recherche dans la pluralité des sciences sociales et de mener des recherches comparatives impliquant plusieurs aires cultuelles. Plusieurs questions préliminaires ont été posées. La fragilité et l’oppression, comme deux expressions de la souffrance sociale, sont-elles associées à une condition sociale (un état) ou correspondent-elles à un processus ? Autrement dit, peut-on parler des groupes fragiles et des groupes opprimés ou doit-on privilégier une analyse des situations et des trajectoires qui conduisent à faire l’expérience de la fragilité et de l’oppression ? Existe-t-il une forme dominante de fragilité et d’oppression ou, au contraire, des formes plurielles, éventuellement cumulables ? La fragilité et l’oppression peuvent-elles être analysées empiriquement dans toutes les couches sociales de la population ou faut-il y voir une caractéristique des catégories populaires ?

 

Pour y répondre, en référence à la théorie de l’attachement social, nous avons associé la fragilité à un déficit de protection et l’oppression à un déni de reconnaissance. En conséquence, nous avons défini quatre configurations : 1) les « liens qui libèrent » (qui procurent aux individus et aux groupes de la protection et de la reconnaissance) ; 2) « les liens qui fragilisent » (qui ne peuvent apporter de véritable protection sans pour autant caractériser un déni de reconnaissance) ; 3) « les liens qui oppressent » (qui peuvent procurer une forme de protection tout en étant l’expression d’un déni de reconnaissance) ; 4) les « liens rompus » au sens d’un cumul des deux dimensions de déficit de protection et de déni de reconnaissance). Chacune de ces quatre configurations a fait l’objet d’approfondissements. Dans le prolongement des réflexions de Simmel, de Durkheim et d’Aron sur la définition de la liberté, nous avons essayé de mieux comprendre l’oxymore des « liens qui libèrent ». Ces derniers ne signifient pas l’absence de contraintes, mais plutôt une adhésion à ces dernières résultant du processus de socialisation. Tout individu intériorise d’autant plus facilement les normes de la vie sociale – qui portant le contraignent - qu’elles lui apportent réellement de la protection (des garanties face à l’avenir) et de la reconnaissance (utilité sociale). Les « liens qui libèrent » ne peuvent, en définitive, être compris qu’en référence à une définition sociologique de la liberté.

 

Nous avons également travaillé sur les « liens qui oppressent » en considérant dans un premier temps qu’ils enferment l’individu dans une relation de subordination - ou d’infériorisation étouffante. L’individu qui en fait l’expérience souffre sans pouvoir échapper à cette relation pour différentes raisons : 1) sa survie en dépend (cas du salarié qui souffre d’oppression au travail, mais qui ne peut pas prendre le risque démissionner et de se retrouver au chômage) ; 2) la crainte de contester l’oppresseur tyrannique ; 3) la peur de perdre les formes de protection qui sont souvent associées à cette relation. Ce premier cadrage sous-entend une relation asymétrique et qu’il ne peut y avoir d’opprimé sans oppresseur. Mais ce dernier a appelé des nuances. Toutes les relations asymétriques ne sont pas oppressantes. Il peut exister des formes d’oppression dans la relation sans que l’on puisse clairement identifier un oppresseur : cas de désaccord persistant dans la vie conjugale, dans la vie professionnelle, etc. Chacun reste camper sur sa position si bien que c’est la relation elle-même qui est oppressante et qui oppresse l’ensemble des parties prenantes. On peut enfin, voir dans l’oppression un conflit qui porte sur l’interprétation du système normatif. Nous avons alors eu recours au concept d’ambivalence tel qui a défini en sociologie. Dans cet esprit, nous avons essayé de distinguer d’un point de vue sociologique les notions d’oppression et de domination. Synonymes dans le sens courant, elles se recoupent toujours au moins partiellement. Néanmoins, l’oppression est une souffrance dont l’individu qui en fait l’expérience en ressort marqué physiquement et moralement. Or, il existe des formes de domination qui sont masquées et qui ne procurent pas de souffrances immédiates. Le rapport à la souffrance est donc un critère qui peut permettre de distinguer les deux notions. L’oppression est toujours une souffrance tandis que la domination ne l’est pas toujours, tant elle peut se manifester sous des formes discrètes et plus ou moins dissimulées. La domination peut entrainer la domestication des dominés.

 

Ce séminaire a été l’occasion d’inviter Julien Talpin et Sümbül Kaya pour nous parler de leur livre L’épreuve de la discrimination. Enquête dans les quartiers populaires (PUF, 2021) et Ana Maria Alvarez, de l’Université Sylvia Henríquez au Chili, sur Fragilités et oppressions dans les formes néo-libérales de l’intervention sociale au Chili. Il a été l’occasion à plusieurs doctorant.es avancé.es de présenter leurs recherches en lien avec la thématique du séminaire : dans l’ordre chronologique, Mathilde Caro et Erwin Flaureau, Natalia Briceno, Lucie Lepoutre, Daniela Ristic, Chloé Ollitrault et Iva Capova.  Nous avons également eu une belle séance autour de la recherche de Jacques Fonlupt, étudiant d’histoire, sur le cas des cagots, minorité longtemps opprimée dans le Sud-Ouest de la France, analysé sous l’angle de la théorie de l’attachement social.

 

Le séminaire débouche sur une sociologie compréhensive des souffrances sociales. Il s’agit d’interpréter les souffrances des hommes et des femmes à partir de leurs causes sociales et, plus précisément, à partir des formes inégales de l’attachement social selon le genre, l’origine sociale, l’origine ethnique, religieuse ou géographique, mais aussi à partir des transformations de l’attachement social dans le temps et des tensions ou ambivalences normatives qui en résultent.



Publications :


Autres

Direction d’ouvrage :

 

Serge Paugam (dir.), 50 questions de sociologie, Paris, PUF, 2020.

 

Direction d’un dossier de revue :

 

Serge Paugam et Sandrine Rui (dir.), Enquêter « à chaud » sur les mouvements sociaux, Sociologie, n°3, vol. 11, 2020.

 

Articles :

 

Serge Paugam - « Se sentir pauvre. Un indicateur spécifique de l’insécurité sociale ? », Revue française de sociologie, 61-2, 2020, p. 107-118.

 

Serge Paugam et Sandrine Rui, « Enquêter « à chaud » sur les mouvements sociaux. Introduction », Sociologie, n°3, vol. 11, 2020, p. 243-249.

 

Serge Paugam, « Editorial. Le dixième anniversaire de Sociologie », Sociologie, n°3, vol. 11, 2020, p. 217-222.

 

Serge Paugam , « Laços à brasileira. Desigualdades e vínculos sociais » (avec Nadya Araujo Guimarães et Ian Prates), Tempo Social, revista de sociologia da Universidade de São Paulo (USP), vol. 32, n° 3, 2020, p. 265-301.

 

Chapitres d’ouvrage :

 

Serge Paugam, « Le lien social est-il en crise ? », in Serge Paugam (sous la dir. de), 50 questions de sociologie, Paris, PUF, 2020, p.  123-131.

 

Serge Paugam, « Les quartiers riches se replient-ils sur eux-mêmes ? », in Serge Paugam (sous la dir. de), 50 questions de sociologie, Paris, PUF, 2020, p. 215-223.

 

Serge Paugam, « Le précariat : une nouvelle classe sociale ? » (avec Patricia Vendramin), in Serge Paugam (sous la dir. de), 50 questions de sociologie, Paris, PUF, 2020, p. 243-251.

 

Serge Paugam, « Comment comprendre le mouvement des Gilets jaunes ? » in Serge Paugam (sous la dir. de), 50 questions de sociologie, Paris, PUF, 2020, p. 327-336.




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